L’enfant joue, passionné et joyeux.
Il entend et il sent, à sa façon, occulte,
Tout ce que disent ou crient les adultes.
Il quitte son cocon doux et soyeux,
Pour revêtir une armure étincelante,
Peau de dragon aux écailles multicolores.
Sous les cris, elles tombent de son corps,
Elles s’en vont à petits pas, chancelantes.
Il les ramasse et les jette aux visages,
Comme une pluie d’arcs-en-ciel,
Comme des châteaux de miel,
Des guerriers redoutables du secret passage.
Il est dévêtu par les brèves exigences :
Il doit ranger sa chambre,
Oublier son collier d’ambre,
Obéir à l’instant à cette cruelle engeance.
Les larmes de l’enfant roulent sur ses joues.
Il voudrait pourtant rester petit,
Comme un oiseau dans son nid,
Ne pas se soucier, si ce n’est des cailloux.
Dans une révolte théâtrale,
Il lève la petite main
Sur qui lui donne le pain.
Ses fesses lui font mal.
L’ordre doit régner dans ce décor Ikea,
Là où les trois suisses renient la papauté,
Là où l’enfance se doit d’être dressée,
Là où la Redoute n’abrite plus de soldats.
« Ne pleure pas ! Écoute, mon petit.
Ce soir, vient nous visiter ta mamie. »
L’horreur ne fait que commencer,
Il faudra certainement l’embrasser.
Image – Illustration by Arthur Rackham (1867 – 1939) to Richard Wagner’s Siegfried. – licence :
